Le Prophète serviteur

Abd al-Haqq Ismaïl Guiderdoni

08-10-2022

« Il n’y a pas de dieu si ce n’est Dieu et Muhammad est l’envoyé de Dieu » ; tel est le témoignage de foi de l’Islam (shahâdah) qui introduit le croyant dans le double mystère de l’Unicité absolue de Dieu, et de la Révélation par l’entremise de Son Envoyé Sayyidunâ Muhammad (çallâ-Llâhu ‘alayhi wa sallam – que la Bénédiction et la Paix de Dieu soient sur lui). Cette Révélation prend dans l’Islam la forme d’un livre sacré, le Qur’ân, dont le Prophète fut le transmetteur fidèle. Mais la réalité de la Prophétie dépasse de loin la trace historique laissée au début de l’Hégire par cet homme dont la mission fut avant tout le service de Dieu, et dont la mémoire a été conservée scrupuleusement par les docteurs de la Loi. Nous voudrions montrer, avec l’aide de Dieu, que le mystère de la Prophétie, selon la doctrine enseignée par l’ésotérisme islamique, s’ancre profondément dans le mystère même de Dieu.

Qu’est-ce que le mystère de Dieu ? À cette question qu’on n’écrit qu’en tremblant, nul ne peut répondre, car Dieu seul connaît Son propre mystère, sous le triple rapport de Sa Majesté (jalâl), de Sa Beauté (jamâl) et de Sa Perfection (kamâl). Dieu Absolu, être nécessaire par Son Essence même, origine de tout être contingent. Dieu Infini, englobant dans Sa connaissance toutes les possibilités. Dieu Parfait, source de toute qualité et de toute perfection. Dieu se connaît Lui-même, en Lui-même, par Lui-même, d’une connaissance qui constitue le secret inépuisable et ineffable de la vie divine, et qu’Ibn ‘Arabî appelle l’effusion très-sainte (al-fayd al-aqdas). Mais Dieu désire partager la connaissance qu’il a de Lui-même : « J’étais un Trésor caché (kanz maknûn) et J’ai désiré être connu. Alors J’ai créé le monde ».1 À l’origine de la création se trouvent donc le vouloir d’amour (irâdah) et la connaissance (ma’rifah). « Car la vision qu’à l’être de lui-même en lui-même n’est pas pareille à celle que procure une autre réalité dont il se sert comme d’un miroir (mir’âh) : il s’y manifeste à lui-même sous la forme qui résulte du “lieu” de la vision ».2 Aussi Dieu dit-il dans le Qur’ân : « Je n’ai créé les hommes et les jinns que pour qu’ils M’adorent. »3 Le secret de la création du monde et de la Prophétie qui l’éclaire résident donc dans l’adoration qui est, selon le commentaire de Ibn ‘Abbâs,4 connaissance de Dieu par la reconnaissance que nous sommes serviteurs et que c’est bien Lui le Seigneur. Cette connaissance de Dieu par Dieu à travers l’adoration que les créatures Lui portent est appelée l’effusion sanctifiée (al-fayd al-muqaddas).

Mais les possibles connus (mumkinât ma‘lûmât) de toute éternité par la Science de Dieu, qui constituent les entités immuables (al-a‘yân ath-thâbitah), n’existent pas. Ils sont dans la non-existence (‘adam). Par Miséricorde (rahmah). Dieu, l’être absolu (al-Wujûd), les délivre alors de leur état de permanence non-existante (thubût) pour les amener à l’existence (wujûd). Si le même mot désigne, dans la doctrine du Soufisme, l’être absolu et l’existence qui est le « mode d’être » relatif des choses, c’est parce que tout ce qu’elles ont d’être leur vient de l’être. Ibn ‘Arabî appelle Expir du Tout-Miséricordieux (nafas ar-Rahmân) le Souffle miséricordieux de nostalgie amoureuse qui relâche l’état de « contraction » dans lequel se trouvent les possibles. L’Expir porte l’ordre initial (al-amr), « Sois (kun) ! », qui est la semence du monde (al-habbah), dans les réceptacles (qawâbil) des entités conçues par Dieu. Mais ces réceptacles ne sont eux-mêmes que le résultat de la connaissance divine des possibles par l’effusion très-sainte. C’est ainsi que Dieu donne l’être (al-wujûd) aux entités. L’être est, selon l’étymologie du mot arabe, ce que l’on « trouve » (wajada). En fait, puisque Dieu seul est, l’on ne « trouve » jamais les choses, mais l’être seul sous des présences (hadrah) différentes. Et « trouver l’être » est, par nature, une « extase » (wajd, dans le vocabulaire technique du Soufisme), selon une hiérarchie de degrés de béatitude.

Dieu seul est l’être nécessaire, le Réel (al-Haqq). Les choses n’ont leur être relatif que par « emprunt ». Elles sont contingentes et auraient pu ne pas être si telle avait été la volonté de Dieu. Dieu donne l’être aux entités et les fait ainsi « sortir » de la non-existence. Il est « Celui qui donne la prépondérance » (al-Murajjih) à l’existence sur la non-existence. En fait, rien ne change pour les entités immuables subspecie aeternitatis. La création leur donne une origine temporelle du point de vue de l’existence, qui n’ajoute ni ne retranche rien à ce qu’elles sont dans leur permanence non-existante. En raison de Son Nom l’Apparent (azh-Zhâhir), Dieu manifeste Son être dans les lieux de manifestation (mazhâhir) des entités en leur empruntant leurs propriétés (âthâr), qui sont simplement des « prédispositions » (isti‘dâdât), des potentialités caractéristiques dans la connaissance divine de l’effusion très-sainte. Réciproquement, les entités se revêtent des attributs divins (çifât) lorsqu’elle sont amenées à l’existence, car toute réalité positive appartient à Dieu. La création est donc tout entière théophanie (tajallî ilâhî) : Dieu seul s’y montre à travers les voiles multiples des propriétés des choses. Sa’îd ad-Dîn al-Farghânî5 résume ainsi la vérité fondatrice de la manifestation : unicité de l’être (wahdat al-Wujûd), mais multiplicité de la Connaissance de Dieu (kathrat al-‘ilm). « Il n’y a rien dont les trésors (khazâ’in) ne se trouvent auprès de Nous ; Nous ne les révélons que selon une mesure connue (bi qadarin ma‘lûm). »6

La raison d’être de l’homme est l’adoration de Dieu, et le but ultime de l’adoration réside dans l’union avec Dieu. La nature de cette union doit être comprise en fonction des principes métaphysiques qui viennent d’être rappelés. Selon Abd ar-Razzâq al-Qâshânî,7 « l’union (al-ittihâd) signifie le témoignage (shuhûd) de l’être du Réel Unique et Absolu (Wujûd al-haqq al-wâhid al-mutlaq), dans lequel toutes les choses existent en réalité. Ainsi toute chose est unie avec Lui, en voyant que tout ce qui existe a son être dans le Réel (mawjûdan bihi). En elle-même, elle n’est rien (ma‘dûman bi-nafsihi). Cela ne signifie pas que quelque chose ait une existence propre antérieure qui, par la suite, serait unie, car cela serait une absurdité ».

L’union est obtenue par la rejonction (al-ittiçâl) qui « advient quand l’individu observe que son entité (‘ayn) est intimement liée à l’être de l’Un (al-Wujûd al-ahadî), tandis que, dans le même temps, il cesse de considérer le lien de son entité à sa propre existence (wujûdihi), et abandonne son attachement à cette dernière. Ainsi il est capable de voir le lien qui s’étend à travers l’existence, lui transmettant continuellement et sans cesse l’Expir du Tout-Miséricordieux, de sorte qu’il puisse continuer à exister en lui (yabqâ mawjûdan bihi). »8

La première présence de Dieu est al-hâhût, l’Ipséité, qui est la présence de l’Unité inconnaissable (al-Ahadiyyah) de l’Essence divine (adh-Dhât). La deuxième présence est al-lâhût, la Divinité, présence de l’Unicité (al-Wâhidiyyah) du Dieu personnel qui se manifeste. Elle est celle des Noms de Dieu. En fait, toute qualité positive de Dieu est un Nom divin. Mais la Loi révélée nous en propose certains de préférence à d’autres, et il nous faut accepter cet ordre providentiel par soumission aux convenances spirituelles (adah). Les Noms ont un sens (ma‘nâ) et une forme (çûrah). Leur sens est le Nommé (al-Musammâ) qui est Dieu. Leur forme fait référence à tel ou tel attribut (çifah). En fait, les Noms ont aussi une autre forme, littérale, qui est « avec nous, dans notre souffle et dans les lettres que nous combinons ». Ces formes littérales que nous pouvons prononcer constituent, selon Ibn ‘Arabî, « les noms des Noms divins, et ils sont comme les vêtements sur les Noms. Nous exprimons les Noms divins à travers les formes de ces Noms dans notre souffle (nafas). (...) Les formes des Noms divins par lesquelles Dieu se mentionne Lui-même dans Sa Parole sont leur existence à l’intérieur du Nom ar-Rahmân (le Tout-Miséricordieux). »9 Ces formes sont à l’intérieur du Souffle, ou Expir, du Tout-Miséricordieux. C’est pourquoi l’on trouve dans le Qur’ân : « Invoquez Allah ou invoquez le Tout-Miséricordieux (ar-Rahmân). Quel que soit le Nom que vous invoquiez, les plus beaux Noms Lui appartiennent (i.e. au Nom ar-Rahmân). »10 Quant aux sens des Noms, qui appartiennent au Nom Allah, ils sont en-dehors du contrôle de l’Expir.

Selon une tradition prophétique, « Dieu a quatre-vingt-dix-neuf Noms, cent moins un. Il est impair et Il aime l’impair. »11 Le Nom ar-Rahmân est celui qui fait référence aux formes des Noms. Quant au sens du Nom Allah, il est le Nom de la synthèse (ism al-jâmi‘) et désigne Dieu dans toutes les présences. Les Noms n’ont pas d’existence, si ce n’est à travers leurs propriétés. Dieu ne devient pas multiple à travers eux, de même qu’un seul homme peut être à la fois fils, époux et père, en fonction des relations qui le lient à autrui. Les Noms sont des relations (nisab) non-existantes entre la Réalité (al-Haqq) et la création (al-khalq). En effet, chaque entité n’est en fait qu’un ensemble de prédispositions (isti‘dâdât) à se revêtir de certaines qualités divines, et se trouve ainsi soumise aux Noms selon sa contenance particulière.

Si la raison humaine bien conduite peut nous mener à l’affirmation de l’incomparabilité divine (tanzîh), seule la Révélation nous apporte l’affirmation paradoxale de la similitude divine (tashbîh), à travers les Noms. En effet, « les Noms divins sont l’isthme (barzakh) entre nous et le Nommé. Ils Le regardent puisqu’ils Le nomment, et ils nous regardent puisqu’ils nous octroient des effets attribués au Nommé. Ainsi ils font connaître le Nommé et ils nous font connaître. »12 Ce lieu de connaissance où les entités se revêtent des attributs divins (at-takhalluq bi akhIâqi-Llâh) et où l’être (al-Wujûd) se qualifie des propriétés (âthâr) des entités est l’Expir du Tout-Miséricordieux. L’ésotérisme islamique appelle encore ce lieu d’échange le Nuage (al- ‘amâ’). En effet, à la question : « Où était notre Seigneur avant qu’il ne crée la création (khalq) ? », le Prophète répondit : « Il était dans un Nuage, au-dessus et au-dessous duquel il n’y avait pas d’air (hawâ’). »13 Ce lieu, qui est la première des créations de Dieu, constitue encore, « le réel à partir duquel toute chose a été créée (al-haqq al-makhûq bihi kullu shay’) », évoqué dans ce verset coranique : « Nous n’avons créé les Cieux et la Terre, et ce qui se trouve entre les deux, que par le réel (bi-l-haqq, ou le vrai, ou la Vérité). »14 Ce réel (haqq) est, selon la doctrine du Soufisme, la réalité intime du Prophète, ou réalité muhammadienne (al-haqîqat al-muhammadiyyah). Le Prophète nous apprend en effet : « J’étais prophète alors qu’Adam était entre l’esprit et le corps. »15 La réalité muhammadienne irrigue la création entière, et se manifeste à travers la succession temporelle des prophètes et des envoyés, pour apparaître une dernière fois, de façon parfaite, en Muhammad :

J’ai été suscité depuis la meilleure génération des fils d’Adam génération après génération, jusqu’à me trouver dans celle dans laquelle je suis actuellement.16

La réalité essentielle du Prophète s’identifie au Livre révélé lui-même, selon le hadîth rapporté par son épouse ‘A’ishah qui disait de lui : « son caractère était comme le Qur’ân. »17 Il possède en effet, par la grâce de la Parole de Dieu, « un caractère immense (khuluq ‘azhîm). »18 Les réalités métaphysiques des qualités divines se manifestent comme perfections des vertus (makârim al-akhlâq) et excellences des actions (mahâsin al-af‘âl) dans la personne du Prophète. Le revêtement des qualités divines se fait en lui selon le mode propre à l’homme. Les Noms de Majesté exaltant la transcendance divine, comme « Celui qui proclame Sa propre Grandeur » ou le « Très-Contraignant » (al-Mutakabbir, al-Jabbâr), sont réservés à Dieu seul et correspondent à des vertus réalisées « négativement » par l’humilité et la servitude. Dieu dit en effet qu’il « met un sceau sur le cœur de tout orgueilleux et de tout tyran (kulli qalbi mutakabbirin jabbâr) »,19 en employant les Noms mêmes qu’il s’attribue ailleurs dans Sa Gloire. En revanche, les Noms de Beauté proclamant la similitude divine, comme le « Charitable » ou le « Très-doux » (al-Barr, ar-Ra’ûf), doivent être réalisés « positivement » par l’homme.

La réalité muhammadienne est encore identique à l’Homme Universel ou Parfait (al-insân al-kâmil), le modèle éternel de la manifestation, la première des réalités manifestées, qui est aussi « la meilleure des formes (ahsan çûrah) »20 sous laquelle Muhammad rapporte avoir vu son Seigneur. Actif vis-à-vis du monde, mais passif vis-à-vis de Dieu, l’Homme Universel possède deux pôles opposés, l’un « essentiel » et l’autre « substantiel », qui en rendent la saisie difficile.21 Ces deux pôles sont représentés dans le Qur’ân par le Calame (al-qalam) et la Table Gardée (al-lawh al-mahfûzh) sur laquelle le Calame écrit les Paroles de Dieu qui constituent l’ensemble des possibilités de manifestation. L’Homme Universel est le symbole suprême (al-mathal al-a‘lâ) à partir duquel le monde manifesté fut amené à l’existence, et par lequel tout ce qui existe prend valeur de symbole et se rapporte, en fin de compte, à Dieu, puisque « c’est à Lui qu’appartient le symbole suprême (lahu-l-mathalu-l-a‘lâ).22 Les Noms de Dieu, identiques dans leur Sens à Dieu, sont lumière puisqu’ils nous font connaître, par leur forme, et Dieu, et la création. Le Qur’ân nous révèle que « Dieu est la Lumière des Cieux et de la Terre »,23 puis il propose une parabole :

le symbole de Sa Lumière (mathalu nûrihi) est comme une niche dans laquelle se trouve une lampe ; la lampe est dans un verre ; le verre est comme une étoile brillante allumée à un arbre béni, un olivier qui n’est ni d’orient ni d’occident et dont l’huile brille presque, même si le feu ne la touche pas. Lumière sur lumière.

La Lumière de Dieu recouvrant la lumière de l’homme : c’est là le mystère auquel le témoignage de foi nous invite. La réalité muhammadienne est la lumière prophétique (an-nûr an-nabawî) dans laquelle le monde a été créé pour que Dieu soit connu à travers les apparences. C’est dans cette lumière que la connaissance salvifique du Qur’ân est révélée, elle aussi symbole du monde manifestant la splendeur de Dieu. Le mystère de la Révélation réside dans le Prophète éternel que recouvre la Parole éclatante, Parole qu’il recouvre à son tour pour la rendre accessible aux hommes. Il est un flambeau brillant (Sirâj munîr24) qui brûle sans être consumé. Car l’homme seul est capable de la Parole de Dieu :

Si Nous avions fait descendre ce Qur’ân sur une montagne, tu aurais vu celle-ci s’humilier et se fendre par crainte de Dieu. Tels sont les symboles que nous proposons aux hommes. Peut-être réfléchiront-ils ?25

Le Prophète possède la plus grande capacité (qadr) puisqu’il a pu recevoir l’ensemble des paroles révélées dans le Qur’ân. Sous cet aspect de Souffle porteur du Verbe de Dieu, la réalité muhammadienne est encore appelée l’Esprit muhammadien (ar-rûh al muhammadiyyah).26 Comme « Dieu n’impose à une âme que ce qu’elle peut contenir (lâ yukallifu-Llâhu nafsan illâ wus‘ahâ) »,27 la prédisposition (isti‘dâd) du Prophète est totale et il est ainsi soumis à l’ensemble des Noms divins. Il s’est vidé de lui-même, pour recevoir la Révélation coranique au cours de la « nuit de la capacité », ou « de la mesure » (laylat al-qadr), qui est « meilleure que mille mois ».28 Le Prophète dit : « j’ai été suscité avec la synthèse des paroles (jawâmi‘ al-kalim). J’ai été aidé par la frayeur (ru‘b) et pendant que je dormais, je me suis vu apporter les clés des trésors de la Terre. »29 Ces trésors de la Terre sont les possibilités de manifestation, alors que Dieu seul « possède les trésors des Cieux et de la Terre ».30 La forme de l’Homme Parfait apparaît en Islam avec le symbole de la lettre arabe nûn, qui aussi celle de l’étoile placée dans le croissant lunaire. Le croissant symbolise la réceptivité du cœur lavé de toute passion mondaine et l’étoile, la lumière prophétique qui s’identifie à cette étoile brillante (kawkab durrî) mentionnée dans la sourate an-nûr.

Le Prophète est désigné par de nombreux noms qui manifestent autant de symboles évoquant les différentes faces du symbole suprême, et nous préparent à nous revêtir des vertus divines. Le nombre des noms témoigne en effet de la noblesse du nommé. La tradition islamique a retenu ces noms dans des invocations à la louange du Prophète Muhammad, dont le nom même signifie « le loué », et « le lieu de la louange de Dieu ».31 Nous voudrions ici évoquer, avec l’aide de Dieu, certains aspects de ce symbole suprême, en relation avec son aspect substantiel. Certes il sera impossible d’en épuiser le mystère, que l’exposé de la doctrine doit contribuer, au contraire, à exalter. L’approche du secret de la Prophétie est réservée à ceux que Dieu installe dans la station de la Proximité (maqâm al-qurbâ), qui est celle de la Prophétie générale (nubuwwah ‘âmmah), juste au-dessous des stations réservées aux envoyés porteurs d’une Loi révélée. L’auteur du traité Shajarat al-Kawn32 raconte que, lorsque Dieu eut créé le Trône, celui-ci « fut ébranlé par une crainte révérentcelle sous l’effet de Sa Majesté ». Dieu écrivit alors sur sa verticalité (qâ’imah) « Lâ ilâha illâ-Llâh » de telle sorte que le tremblement du Trône s’accrut. Puis Dieu écrivit « Muhammadun rasûlu-Llâh » et l’agitation et le trouble du Trône se calmèrent. Celui-ci s’écria alors : « Ton nom apporta la sécurité à mon cœur, tranquillisa mon secret, charma mon effroi. Ton nom agit sur moi par son influence bénéfique ».33

En fait, si le Trône de Dieu lui-même ne peut supporter l’évidence éclatante proclamée par la première partie du témoignage de foi, comment le monde pourrait-il exister ? Mais Dieu, dans sa Miséricorde, a révélé la deuxième partie du témoignage de foi, qui permet au Trône de rester stable, et maintient le monde dans l’existence. C’est pourquoi Dieu dit dans le Qur’ân à propos du Prophète : « En vérité, nous ne t’avons envoyé que comme une Miséricorde pour les mondes. »34 Muhammad est donc Miséricorde (Rahmah). Alors que Dieu Seul est le Tout-Miséricordieux (ar-Rahmân) qui manifeste la Miséricorde divine par la création du monde, le Prophète est qualifié, comme Dieu, du nom Très-Miséricordieux (Rahîm) qui exprime la manifestation de la Miséricorde divine par le salut du monde. En tant que racine du maintien de la création, le Prophète est aussi le lieu d’échange par lequel Dieu déverse Son Amour sur le monde, et les hommes exercent leur amour de Dieu. Le Qur’ân demande au Prophète de proclamer ce rôle essentiel : Si vous aimez Dieu, suivez-moi. Alors Dieu vous aimera et vous pardonnera vos péchés.35 Le Prophète est donc l’isthme (barzakh) entre Dieu (al-Haqq) et la création (al-khalq), le confluent entre les deux mers (majma‘ al-bahrayn),36 celle, amère et salée, de ce monde-ci (ad-dunyâ) et celle, douée à boire, de l’Autre Monde (al-Akhirah), le lieu de descente des influences spirituelles et de notre ascension vers Dieu.

Mais le Prophète Muhammad, qui, dans son essence, s’identifie à la lumière prophétique, fut, dans sa réalité visible dans le monde de la manifestation formelle, un homme mortel (bashar), avec une origine et une fin temporelles. La Parole de Dieu lui enjoint de le répéter :

Dis : ‘Je ne suis qu’un homme comme vous. Il m’est révélé que votre Dieu est un Dieu unique. Que celui qui espère la rencontre de son Seigneur accomplisse des œuvres bonnes et qu’il n’associe rien dans l’adoration de son Seigneur’.37

Muhammad n’est qu’un homme, proclame la Parole coranique. Or cette phrase est précisément celle que répètent de tout temps ceux qui demeurent incrédules malgré le message des Envoyés de Dieu, comme en témoignent par exemple les versets suivants :

Leurs envoyés dirent : ‘Y a-t-il un doute en Dieu, le Créateur des Cieux et de la Terre ? Il vous appelle pour vous pardonner certains de vos péchés et vous donner un délai jusqu’à un terme fixé’. Ils répondirent : ‘Vous n’êtes que des hommes comme nous’.38

Certes, Muhammad est mortel, mais il n’est pas un homme ordinaire. Il est homme comme le joyau au milieu des pierres. Il est l’Élu purifié (Muçtafâ), le Choisi (Mukhtâr), le meilleur de l’humanité (Khayr al-bariyyah). Dieu n’a-t-il pas ouvert sa poitrine pour laver son cœur de toute tache ?39 Il possède l’impeccabilité (‘içmah). Le Qur’ân attribue ce titre d’élu à d’autres prophètes, mais les incrédules de toutes les époques, arrêtés par l’écorce des êtres, ne voient que les pierres et ne savent pas y distinguer le joyau. Leur absence de discrimination les empêche de faire la différence entre l’homme déchu, tombé dans l’état le plus bas (asfala sâfilîn), et l’homme restauré dans la meilleure des dispositions (f ahsani taqwîm)40 créée par Dieu.

L’homme mortel fut créé par Dieu à partir de l’argile : « Ton Seigneur dit aux Anges : En vérité je vais créer un homme (bashar) à partir de l’argile »,41 c’est-à-dire de l’eau et du fin limon qui représentent l’aspect psychique et l’aspect corporel de l’individualité humaine (an-nafs). Mais Dieu ne laissa pas ce corps inanimé et y projeta de Son Souffle, ou de Son Esprit (min rûhî).42 Puis II intima aux Anges l’ordre de se prosterner devant Adam, ce qu’ils firent, à l’exception d’Iblîs qui s’enorgueillit et refusa. Alors Dieu l’interroge : « Qu’est-ce qui t’a empêché de te prosterner devant ce que J’ai créé de Mes Mains ? ».43 Aussi est-il dit que l’homme pétri des « deux Mains » a une double nature : il participe à la fois de ce monde-ci et de l’Autre. Ibn ‘Arabî commente ainsi le verset : C’est à cause de ce pétrissement par Ses deux Mains que Dieu appela alors bashar, ce mot faisant allusion à la tendresse (al-mubâsharah, mot de la même racine BShR) qui fut prodiguée à l’homme par les deux Mains divines qui le façonnèrent.44 Car la Miséricorde de Dieu envers la création s’est exprimée en l’homme, lieutenant de Dieu (khalîfat Allah), et « clarté du miroir du monde ».45

Iblîs ne croit pas en l’homme, créé à partir d’argile alors que lui-même est fait de feu pur. En fait, Iblîs ne croit pas davantage en Dieu, puisqu’il refuse d’obéir à l’ordre direct et explicite que Celui-ci lui donne. Iblîs préfère à Dieu l’idée qu’il se fait de Dieu, à travers la glorification qu’il Lui porte. Après avoir demandé à Dieu de lui accorder un délai pour qu’il montre à quel point l’homme est peu digne de confiance, Iblîs devient l’adversaire déclaré de l’homme, qu’il va s’efforcer de faire trébucher.46 En revanche, Dieu est, Lui, al-Mu’min, le Croyant, Celui qui fait confiance en l’homme, auprès duquel II a mis un dépôt (al-amânah), celui de la foi et de la connaissance libres, ou relativement libres. Quant à Muhammad, il est le modèle du croyant (al-mu’min), le premier à croire en la Parole révélée par Son Seigneur. Comme, selon le hadîth, « le croyant est le miroir du croyant »,47 la doctrine du Soufisme explique que Dieu le Croyant Se connaît dans le miroir de Son serviteur croyant, de même que le serviteur se connaît dans le miroir de Dieu. C’est dans le Prophète seul, modèle exemplaire du croyant, que l’on peut placer sa confiance (Ma’mûn) car il est l’homme sûr (Amîn). La racine BShR dont dérive le mot bashar, a aussi le sens de bonne nouvelle (bushrâ). Dieu dit du Prophète : « En vérité Nous t’avons envoyé avec la Vérité comme annonciateur de bonne nouvelle, et avertisseur ».48 Le Prophète est porteur de la bonne nouvelle (Bashîr), ou annonciateur de la bonne nouvelle (Mubashshir), qui est évidemment la Révélation providentielle du Qur’ân par l’Ange Jibrâ’îl :

En vérité c’est lui qui a fait descendre sur ton cœur, avec la permission de Dieu, ce qui confirme ce qui était avant lui, une direction et une bonne nouvelle pour les croyants.49

La bonne nouvelle est celle du rappel de la religion immuable (dîn qayyim), celle de l’homme dans sa nature primordiale (al-fitrah), « nature surnaturelle » qui est la constitution harmonieuse voulue par Dieu. Aussi Muhammad, modèle exemplaire de cet homme restauré, est-il lui-même bonne nouvelle (Bushrâ) dans les litanies à sa louange.

Le Prophète dit un jour : « Les deux missions, légiférante et prophétique, sont arrivées à leur terme et il n’y aura plus ni envoyé, ni prophète après moi ». Ces paroles furent pénibles aux compagnons et le Prophète ajouta alors : Mais il reste les annonciatrices des bonnes nouvelles (al-mubashshirât) ». Ils demandèrent : « ô Envoyé de Dieu, que sont les mubashshirât ? » Il répondit : « Les visions (ru’yâ) des musulmans. Elles constituent l’une des parties de la Prophétie ».50 Les visions nocturnes des musulmans sont une participation au monde de l’imagination active (‘âlam al-khayâl) ou monde médian (‘âlam al-awsat), domaine des visions véridiques, où la Parole de Dieu se revêt de la réalité formelle des mots et des symboles révélés dans le Qur’ân, et où la rencontre avec le Prophète est possible. « Celui qui me voit vrai (ou voit la Vérité) »51 rapporte le Prophète.

Le Prophète lui-même fut visité par des visions nocturnes avant de rencontrer Jibrâ’îl et de recevoir le Qur’ân. Mais le monde de l’imagination active est surtout celui de la perfection contemplative (ihsân) qui consiste, selon le célèbre hadîth rapporté par ‘Umar, « à adorer Dieu comme si tu Le voyais car si tu ne Le vois pas. Lui Il te voit. »52 Cette vision de Dieu est promise aux élus dans la Vie future. Les voyageurs sur le chemin de Dieu sont ceux qui s’efforcent de « mourir avant de mourir », pour « voir Dieu avant de Le voir », en quelque sorte. L’Ihsân est l’entrée dans le monde de l’imagination active constituant la « vaste Terre de Dieu (ardu-Llâhu-l-wâsi‘ah)53 qui est mentionnée à plusieurs reprises dans le Qurân, et où Dieu donne l’ordre aux croyants de l’adorer.54 En effet. Dieu est Celui qui englobe tout (al-Wâsi‘). « Il est le Maître du Trône immense (‘arsh ‘azhîm)55 qui constitue la réalité contenant tous les possibles. « Ceux qui portent le Trône et ceux qui sont autour de lui proclament la gloire et la louange de leur Seigneur ; ils croient en Lui et ils demandent pardon pour ceux qui croient : « Notre Seigneur, Tu englobes (wasi‘ta) toute chose par Ta Miséricorde (rahmah) et Ta Science (‘ilm) ».56 Aussi l’immensité (al-‘azhamah) du monde médian a-t-elle sa racine divine57 dans la capacité tout-englobante de Dieu, selon Son Nom l’Immense (al-‘Azhîm).

Ibn ‘Arabî raconte que Dieu, après avoir créé Adam, utilisa ce qui resta d’argile pour créer le Palmier, puis du dernier petit morceau gros comme un grain de sésame. Il créa le monde médian. Les constitutions de l’Homme Universel, de l’Arbre du Monde, et de ce monde médian sont donc homologues. Ce monde, qui s’identifie à la réalité muhammadienne, est lui aussi un isthme (barzakh) assurant ainsi le passage entre le non-manifeste et la manifestation. Il est le lieu de la troisième présence, l’omnipotence (al-jabarût) où se rassemblent les prototypes des réalités qui vont se manifester dans la quatrième et la cinquième présence, qui sont la Royauté (al-malakût), monde de la manifestation informelle, des principes intelligibles (ma‘ânî) et du mystère (al-ghayb), et le Royaume (al-mulk), monde de la manifestation formelle, de la lettre des choses (harf) et de l’attestation immédiate de l’apparence (shahâdah).58 Le monde de l’imagination active ne doit pas être confondu avec les mondes psychiques « intermédiaires », ceux des jinns, qui appartiennent à la manifestation formelle, c’est-à-dire au Royaume. L’imagination active n’est pas l’imaginaire individuel, le fantasme ou la fantaisie, de même que la perfection contemplative de l’ihsân n’est pas l’hallucination. En effet, le monde de l’imagination active constitue le lieu où les esprits prennent une forme et où les formes se résolvent en esprit. Il est évoqué dans le Qur’ân à propos de Maryam, lorsque Dieu lui envoie Son Esprit « qui lui apparut sous l’image d’un homme parfait (fa-tamaththala lahâ basharan sawiyyan) ».59 Ce monde médian participe nécessairement de la réalité du monde formel et de celle du monde informel, afin d’assurer sa fonction de lieu d’échange. Ainsi y a-t-il équivalence entre le point de tangence des deux mondes qui relie les réalités de l’un aux réalités de l’autre, et le cercle qui les englobe tous deux. La racine divine de cette réalité omniprésente se trouve dans le Nom divin le « Subtil » (al-Latîf), souvent associé dans le Qur’ân au « Bien-Informé » (al-Khabîr).

On l’appelle encore monde des semblables ou des symboles (‘alâm al-amthâl) puisque le lien qu’il tisse entre le sens et la forme donne à la forme une permanence qui est une image de l’immuabilité du sens. C’est grâce au monde des semblables que la création peut se renouveler à chaque souffle, sans que les apparences des choses soient complètement modifiées, sinon par l’origination temporelle de nouvelles possibilités et la disparition des anciennes. Les formes déroulent en effet dans le temps, selon le rythme des compossibles, l’ensemble des possibilités inhérentes à l’entité qu’elles manifestent. Le lien entre le sens et la forme fait de la forme le symbole du sens. Les sens de la Parole de Dieu y revêtent les lettres du texte coranique, comme les attitudes spirituelles fondamentales qui manifestent la servitude ontologique se revêtent des formes rituelles des actes d’adoration. Le monde médian est donc la racine métaphysique du symbolisme. C’est pourquoi les rites de l’Islam viennent de l’imitation des vertus et des actes du Prophète, Homme Universel qui s’identifie à l’isthme de la troisième présence.

La réalité du Prophète est éminemment soumise à Dieu. Selon un hadîth qudsî, « Dieu (qu’il soit glorifié et magnifié) dit en donnant le choix à Son Prophète : “Si tu le veux, tu seras Prophète-Serviteur ou Prophète-Roi”. Jibrâ’îl lui inspira d’être humble, et le Prophète répondit : “Un Prophète-Serviteur”. »60 Parce que Dieu seul est Roi (al-Malik), le Prophète a renoncé à la royauté et n’est vis-à-vis de Dieu, selon le témoignage de foi, que « Son Serviteur et Son Envoyé (abduhu wa rasûluh) ». En conformité avec cette servitude, alors qu’il venait de reconquérir victorieusement la Mecque aux païens, le Prophète entra dans la Ville sacrée en se courbant sur sa chamelle. Ce signe d’humilité témoignait qu’il n’y a de vainqueur que Dieu (Lâ ghâliba illâ-Llâh). La tradition islamique a conservé comme un don unique la mémoire de la parfaite servitude et humanité du Prophète recevant en Révélation la synthèse des Paroles divines. À partir des versets coraniques qui s’ancrent profondément dans le mystère, la théologie islamique, en développant sa propre perspective exotérique et en construisant ses énoncés dogmatiques, met l’accent sur la soumission totale de l’homme renouvelé à l’ordre de Dieu (al-amr), soumission qui est véritable servitude d’adoration et chemin vers le Seigneur. La doctrine de l’ésotérisme islamique complète cette perspective en interprétant la Parole de Dieu révélée au Prophète comme la manifestation de la réalité essentielle de Muhammad, par laquelle le monde a été créé.

Ibn ‘Arabî explique l’importance de cette station de la servitude et de rabaissement :

La pure servitude, sans aucune trace de seigneurie quelle qu’elle soit, peut seulement appartenir à l’Homme Parfait, tandis que la Seigneurie sans aucune trace de servitude peut seulement appartenir à Dieu.61

Il rapporte alors la question d’al-Bistâmî :

‘Seigneur, par quoi pourrais-je me rapprocher de Toi ?’ Dieu dit : ‘Au moyen de ce par quoi Dieu traite habituellement Ses amis : Rapproche-toi de Moi au moyen de ce que Je ne possède pas : le rabaissement et la pauvreté’.62

C’est la sincérité de la soumission en conformité au modèle excellent (al-ittibâ‘) qui permet de transformer le culte formel que constituent les rites d’adoration (‘ibâdah) en pure servitude de Dieu (‘ubûdiyyah) manifestant la servitude radicale (‘ubûdah) de la créature. La ‘ubûdah est notre statut ontologique, que nous le voulions ou non. La ‘ubûdiyyah représente la réalisation spirituelle de cet état ontologique, par connaissance de la volonté de Dieu et libre soumission à elle. Ontologiquement, nous ne sommes rien vis-à-vis de Dieu, mais nous sommes pleinement ce que nous devons être en conformité avec le vouloir de Dieu lorsque nous reconnaissons librement la hiérarchie des présences divines et leur action en nous. « Il n’y a pas de proximité de Dieu si ce n’est à travers ce qui est plus spécifiquement ton attribut, non le Sien »,63 commente Ibn ‘Arabî. Parce qu’il réalisa la pure servitude (al-‘ubûdiyyah al-mahdah), le Prophète, aimé de Dieu (Habîb Allâh), fut amené par Dieu auprès de Lui, lors du Voyage nocturne (al-isrâ’) et de l’Ascension (al-mi‘râj). Après qu’il eut mis le pied sur le « tapis de l’intimité » (bisât al-uns), il y reçut directement de Dieu les formules de la prière canonique.

Le Prophète Muhammad est le modèle exemplaire du serviteur (‘abd) et ce serviteur est illettré (ummî) comme l’enfant qui sort du sein de sa mère. Cette virginité spirituelle provient de la restauration de la nature primordiale. Muhammad s’étonne du miracle annoncé par Jibrâ’îl lors de sa retraite dans la caverne du Mont Hirâ’. Alors que l’Ange lui présente le Livre et lui intime l’ordre initial : « Lis (Iqra’) ! ». Muhammad répond « Je ne sais pas lire (m anâ bi-qâri’) ! ». En portant ainsi témoignage sur lui-même, Muhammad reconnaît son statut ontologique d’illettré. Mais l’Ange renouvelle par deux fois l’ordre divin, en pressant Muhammad contre sa poitrine. Puis la nature du Prophète cède et le miracle se produit. Les premiers versets de la sourate al-‘alaq64 sont alors révélés. Le hadîth poursuit alors son récit65 :

En possession de ces versets, le cœur tout palpitant, le Prophète rentra chez (son épouse) Khadîjah bint Khuwaylid et s’écria : ‘Enveloppez-moi ! Enveloppez-moi ! (zammilûnî zammilûnî)’. On s’empressa de le tenir enveloppé jusqu’au moment où son effroi fut dissipé. Alors, s’adressant à Khadîjah, il la mit au courant de ce qui s’était passé, puis il ajouta : ‘Ah ! J’ai cru que j’en mourrais (khashîtu ‘alâ nafsî) !’. Puis la Révélation fut interrompue pendant trois années environ, interruption qui prend le nom de ‘l’intervalle’ (fatrat al-wahy) et qui plongea le Prophète dans le désespoir. Puis, tandis que je marchais, dit le Prophète, j’entendis une voix qui venait du ciel. Levant alors les yeux, j’aperçus l’Ange qui était venu me trouver à Hirâ’ ; il était assis sur un trône entre le ciel et la terre. Effrayé à cette vue, je rentrai chez moi en criant : ‘Enveloppez-moi ! Enveloppez-moi !’ Alors Dieu me révéla ces versets : ‘ô toi qui es revêtu d’un manteau (yâ ayyuhâ-l-muddaththir), lève-toi et avertis, glorifie ton Seigneur, purifie tes vêtements, fuis l’abomination’.66

La Parole de Dieu est d’abord ordre (amr), ordre initial de la lecture, ordres de mission, de glorification et de purification.

Le Qur’ân, descendu synthétiquement au cours de la nuit de la capacité, sera explicité petit à petit pendant le restant de la vie du Prophète, en fonction des circonstances qui constituent, en quelque sorte, la prédisposition propre à la première communauté islamique. Mais les versets sortent dans la douleur. La Révélation est dure à supporter et fait ployer la nature humaine, psychiquement et physiquement. Zayd Ibn Thâbit raconte :

J’étais à côté de Muhammad quand la Présence divine (as-sakînah) vint sur lui. Sa jambe tomba sur la mienne si lourdement que je craignis qu’elle en fût brisée. Quand il recouvra ses esprits, il me dit : ‘Ecris’, et je transcrivis la sourate an-nisâ.67

‘Abd Allah Ibn ‘Amr rapporte, pour sa part, un autre événement : « La sourate al-mâ’idah fut révélée par l’Envoyé de Dieu alors qu’il se trouvait sur son chameau. La bête ne put plus le porter, de sorte qu’il dut en descendre ».68 La Révélation s’accompagne de phénomènes impromptus : « A certains moments, dit le Prophète, elle m’arrive pareille au tintement d’une clochette et c’est pour moi la plus pénible. Puis la Révélation s’interrompt, et alors seulement je saisis ce que l’Ange m’a transmis. D’autres fois, l’Ange se montre à moi sous une forme humaine, il me parle et je retiens ce qu’il m’a dit »69. ‘A’ishah ajoute : « Certains jours que le froid était très vif, je vis le Prophète recevoir la Révélation ; au moment où elle cessait, le front du Prophète ruisselait de sueur »70. Ibn ‘Abbâs raconte encore : « L’Envoyé de Dieu essayait de calmer la souffrance que lui inspirait la Révélation, et c’est dans ce but qu’il remuait les lèvres.71 (...) Ce fut dans ces circonstances que Dieu fit descendre ce verset : “Ne remue pas ta langue pour hâter la Révélation. En vérité c’est à Nous qu’il appartient de la rassembler et de la réciter. Quand Nous la récitons, suis sa récitation. Puis c’est Nous qui la rendrons explicite”. »72 C’est Dieu, en effet, qui est le premier Lecteur du Qur’ân. Et lorsque le croyant lit le Qur’ân, c’est encore Dieu qui est le seul Lecteur, comme au jour initial.

Le Prophète avait coutume de s’envelopper dans un manteau, en particulier au moment de la descente du Qur’ân, pour cacher le trouble dans lequel elle le jetait. Ce manteau représente sa contenance spirituelle au point que al-Muddaththir, le Revêtu, est le premier des noms par lesquels Dieu interpelle Son Prophète dans le déploiement de la Parole coranique. Par la suite. Dieu l’apostrophera en des termes voisins : «  toi qui est enveloppé (al-Muzammil) ! Tiens-toi debout en prière une grande part de la nuit, la moitié, un peu moins ou davantage, et récite avec soin le Qu’rân. »73 Le manteau symbolise la réceptivité de la substance originelle dont est tissée la création, et à laquelle s’identifie l’aspect passif de l’Homme Universel. L’enveloppement dans le manteau manifeste ce secret. La réalité intérieure recouvre alors l’extérieur. La nature du Prophète est intimement symbolisée par ce manteau, comme cela apparaît dans un hadîth où Abû Hurayrah demande au Prophète : « “ô Envoyé de Dieu, j’ai entendu un grand nombre de ahâdîth de toi et je les oublie”. — “Etends ton manteau”, me répondit-il. Je l’étendis. Il fit le geste de plonger dans ce manteau avec sa main et, cela fait, il me dit : “Rassemble ton manteau”. Je le rassemblai, et depuis je n’ai pas oublié un seul hadîth. »74 C’est ainsi que Abû Hurayrah devint, par une grâce divine, le conservateur des secrets de la sunnah, et le plus important rapporteur du hadîth.75 Le manteau du Prophète illettré (ummî), parce qu’il manifeste la fonction prophétique d’instaurateur de la sunnah (Muqîm as-sunnah), est donc symbole de préservation de la communauté islamique (ummah).

Le miracle éminent (mu‘jizah) qui témoigne de la véracité du Prophète est le Qur’ân lui-même, livre inimitable (mu‘jiz). Mais Muhammad a accompli d’autres miracles. En particulier, la tradition prophétique relate qu’il multiplia, à plusieurs reprises, nourriture et eau pour ses compagnons. Il est le seul à supporter le jeûne total, de jour et de nuit (al-wiçâl), parce que Dieu le nourrit et l’abreuve. Il témoigne de la Providence divine (ar-Rizq) dont il est l’instrument, le Détenteur de la Grâce abondante (çâhib al-fadîlah). « Par la clarté du matin et la nuit quand elle s’étend, ton Seigneur ne t’a ni abandonné ni haï. »76 Lors d’une vision nocturne (ru’yâ), le Prophète reçut une coupe de lait, « qu’il but jusqu’à ce que le bout même de ses doigts en fut désaltéré. »77 Ce lait, selon l’interprétation qu’il en donna, est la connaissance (al-‘ilm) donnée par Dieu, en un Amour presque maternel,78 à Son Prophète ummî. Dans un autre hadîth, Abû Hurayrah rapporte que le Prophète le reçut chez lui, alors qu’il souffrait de la faim. Ils trouvèrent un bol de lait offert en aumône. Le Prophète demanda alors à Abû Hurayrah d’aller trouver les gens du Banc et de les inviter à venir partager le lait, ce qu’ils firent. Abû Hurayrah rapporte alors, avec franchise, son mécontentement à l’idée de devoir partager. Puis le Prophète lui dit : « Prends ce bol et donne-leur à boire ». Abû Hurayrah raconte : « Je saisis le bol et me mis à le donner à chacun d’eux, qui buvait à satiété, puis me rendait le bol que je donnais à un autre, qui en buvait à satiété et me le rendait à son tour, jusqu’à ce que je fusse parvenu au Prophète après que tout le monde eut bu à satiété. (...) Il me dit : “Assieds-toi et bois !” Je m’assis alors et je bus. Il dit encore : “Bois !” et je bus. Il ne cessa de me redire à chaque fois que j’eus bu : “Bois !” jusqu’à ce que je lui dise : “Non, par Celui qui t’a envoyé porteur de la vérité, je n’ai plus de place où le mettre”. Le Prophète dit alors : “Montre-moi donc”. Je lui donnai le bol. Il loua Dieu, dit : “Au Nom de Dieu”, et but tout ce qu’il en restait. »79 Dieu donne à chacun la connaissance qu’il peut contenir, mais le Prophète seul peut boire toute la coupe. Abû Hurayrah, gardien de la coutume prophétique, se trouve malgré lui l’échanson de cette connaissance, que le Prophète partage avec les gens du Banc (ahl aç-çuffah), les plus pauvres des pauvres qui vivaient dans la mosquée de Médine tout près de ses appartements, et que les gens du Soufisme reconnaissent comme les premiers d’entre eux.

Dans ces quelques traditions éclate la Grâce propre à la coutume prophétique. Alors que le Qur’ân, Parole de Dieu, déploie sa floraison d’images sublimes et déconcertantes, de paraboles mystérieuses, de promesses magnifiques et de menaces terribles en une langue d’une majesté et d’une beauté inimitables, le hadîth témoigne de l’extrême simplicité de ses moyens. Les actes les plus ordinaires, ceux de la vie courante, y deviennent, tout naturellement, les supports de réalités métaphysiques, parce que tous les symboles particuliers se réfèrent, en dernière instance, au symbole suprême, l’Homme Universel. Le mystère de la réalité prophétique se trouve dans la présence constante à ce monde-ci et à l’autre, dans la même attention spirituelle, puisqu’elle s’identifie au jabarût qui les englobe et les relie au sein de la Connaissance divine.

Cette coexistence des deux présences apparaît de façon bouleversante au moment des derniers instants du Prophète. Quand celui-ci sentit venir la mort, il s’allongea sur sa couche et laissa reposer sa tête sur la poitrine de ‘A’ishah. « Pourtant, lorsque ‘Abd ar-Rahmân, le frère de ‘A’ishah, entra dans la pièce, en tenant à la main un cure-dent (c’est-à-dire une tige de siwâk), elle vit le Prophète regarder l’objet de telle façon qu’elle sût qu’il le désirait. Elle le prit donc de la main de son frère et le mâcha pour le ramollir. Puis elle le donna au Prophète qui s’en frotta les dents avec une vigueur qui contrastait avec sa faiblesse ». Le nettoyage des dents fait en effet partie des convenances de la prière et de la conversation intime avec Dieu, et le Prophète sait qu’il va être rappelé auprès de son Seigneur pour l’ultime rencontre. ‘A’ishah raconte alors les derniers instants :

Pendant qu’il était bien portant l’Envoyé de Dieu disait : ‘Aucun prophète n’a rendu son âme à Dieu sans qu’auparavant Il ne lui ait montré la place qu’il occuperait dans le Paradis en lui laissant ensuite le choix (entre la mort et la vie)’. Quand le moment fatal arriva, il avait sa tête appuyée sur ma cuisse ; il s’évanouit un instant, puis, revenant à lui, il fixa son regard vers le plafond en disant : ‘Grand Dieu, le Compagnon le plus Elevé (Allâhumma ar-rafîq al-a‘lâ) !’ Je me dis alors qu’il préférait ne pas rester parmi nous et je compris le sens des paroles qu’il nous disait quand il était bien portant. Les derniers mots qu’il prononça, ajouta ‘A’ishah, furent : ‘Grand Dieu, le Compagnon le plus Elevé’. »80

La communauté musulmane fut abasourdie par l’annonce de la mort du Prophète. C’est alors qu’Abû Bakr, le Véridique, prit la parole : « Louange à Dieu. ô Peuple, quiconque adorait Muhammad, Muhammad est mort. Mais pour celui qui adore Dieu, Dieu est Vivant et ne meurt jamais ». Ainsi fut close la Prophétie. Mais, selon le hadîth, « les savants sont les héritiers des Prophètes. »81 Pour la théologie islamique exotérique, les savants sont ceux qui conservèrent le Qur’ân et la mémoire de la coutume du Prophète, d’abord par transmission orale, puis à travers la connaissance livresque qui ne s’obtient que par de longues et patientes études. Les croyants continuent de prier Dieu et d’invoquer Son pardon et Sa Miséricorde selon l’exemple du Prophète, avec les mots mêmes qu’il leur a laissés. Ils demandent à Dieu de prier sur lui et sa famille, pour perpétuer son souvenir à la satisfaction même de Dieu qui dit dans le Qur’ân : « Dieu et ses Anges bénissent le Prophète. ô Dieu qui croyez, invoquez pour lui la bénédiction et le salut de Dieu. »82 L’Envoyé de Dieu a promis à ceux qui disent une prière sur lui une intercession au jour du Jugement : « Les gens qui seront les plus dignes de ma sollicitude et de mon amour, le jour de la Résurrection, seront ceux qui me bénissaient le plus dans ce bas-monde. »83 En effet, « Chaque Prophète a eu une invocation exaucée quand il s’en servait. Pour moi, je tiens à cacher la mienne parce que je veux m’en servir pour intercéder en faveur de ma nation dans l’Autre Monde. »84

Quand on lui demanda la façon de prier sur lui et de le bénir, le Prophète livra cette formule :

ô mon Dieu, prie sur Muhammad et sur la famille de Muhammad comme Tu as prié sur Abraham et sur la famille d’Abraham, et bénis Muhammad et la famille de Muhammad comme Tu as béni Abraham et la famille d’Abraham. En vérité Tu es digne de louange et de gloire.85

Le Prophète s’affirme l’héritier d’Abraham, pur croyant (hanîf), père des trois religions monothéistes. Parce qu’il vient accomplir la promesse faite à Ismaël, fils d’Abraham et d’Agar la servante (Hâjar, mot dont la racine HJR évoque l’idée de fuite) qui furent obligés de fuir au désert de Parân, le Prophète est lui-même « serviteur » et « émigrant » (Muhâjir, de la racine HJR), respectant en cela l’ordre coranique donné au tout début de la Révélation : « Fuis l’abomination (wa-r-rujza fa-hjur) ». Cette émigration symbolique est en relation avec l’entrée dans le monde médian, la vaste Terre de Dieu : « La Terre de Dieu n’est-elle pas assez vaste (wâsi‘ah) pour vous permettre d’émigrer ?86 Muhammad fuira les persécutions des Mecquois en se réfugiant à Yathrib. Cette fuite (hijrah) initiera le début du cycle islamique (l’Hégire), et constituera l’acte fondateur de Médine, la Ville du Prophète (Madînat an-Nabî) qui sera le centre d’où rayonnera, vers les quatre points cardinaux, l’expansion de l’Islam.87 L’eschatologie musulmane annonce, pour la fin des temps, le retour du Christ, de la maison de David, issu de la lignée d’Isaac, fils cadet qu’Abraham eut avec son épouse Sarah la princesse. Le Christ sera alors le premier des croyants, imam et juste arbitre (hakam ‘adl). Et Muhammad le serviteur, issu de la lignée d’Ismaël fils de la servante, vient achever avec humilité la promesse merveilleuse faite par Dieu à Abraham à propos de sa descendance, en devenant, lors du jour du Jugement, intercesseur et consolateur.88

L’appel à la prière est une anticipation de l’appel de la Résurrection. Le premier appel (adhân) symbolise la première sonnerie de la Trompette du Jugement (al-râjifah)89 qui terrassera tous ceux qui l’entendront. Puis retentit le second appel (iqâmah) qui invite les musulmans à se dresser (qâma) pour accomplir la prière. Ce second appel se rapporte à la deuxième sonnerie (al-râdifah)90 qui sera celle de la Résurrection (qiyâmah, de la même racine QWM). Le hadîth rapporte que les croyants en attente du Jugement diront alors : « Si nous demandions à quelqu’un d’intercéder en notre faveur auprès du Seigneur afin qu’il nous délivre de cette attente ». Ils iront trouver les prophètes les uns après les autres, mais ceux-ci répondront : « Je ne suis pas l’homme qu’il vous faut ». Et le Prophète Muhammad raconte :

Ils viendront me trouver et je demanderai au Seigneur une audience dans Sa demeure. On m’accordera cette audience et, dès que je verrai Dieu, je tomberai prosterné ; après que j’y sois resté le temps qu’il aura voulu m’y laisser, Dieu dira : ‘Relève-toi, Muhammad. Parle, on t’écoutera ; intercède et tu seras exaucé ; demande et tu obtiendras’. Alors je relèverai la tête, je donnerai au Seigneur les louanges et les actions de grâce qu’il m’a enseignées, puis j’intercèderai. On me désignera un groupe ; je sortirai et les ferai entrer dans le Paradis. Puis le Prophète revient intercéder une deuxième et une troisième fois. Cela fait, il ne restera plus en Enfer que ceux que le Qur’ân y aura immobilisés, c’est-à-dire obligés à y demeurer immortels. Ensuite le Prophète récita ces mots du Qur’ân : ‘Peut-être ton Seigneur te suscitera-t-il une station de louange (maqâm mahmûd)’91 et commenta : II s’agit dans ces mots ‘une station de louange’ de celle que Dieu a promise à votre Prophète.92

Celui qui prie sur moi une fois, Dieu prie sur lui dix fois. Demandez alors pour moi l’accès d’intercession (wasîlah) ; c’est une demeure dans le Paradis qui ne convient qu’à un seul des serviteurs de Dieu et j’espère que je serai celui-là. Celui qui demande pour moi l’accès d’intercession, l’intercession (shafâ‘ah) lui sera ouverte au jour de la Résurrection.93

Aussi est-il traditionnel, après l’appel à la prière (adhân), de réciter sur le Prophète, Détenteur de l’accès d’intercession (çâhib al-wasîlah) et de l’intercession (çâhib ash-shafâ‘ah), l’invocation suivante qui se rapporte précisément à la station de l’intercession : «  mon Dieu, Seigneur de cet appel parfait et de cette prière qui vient, donne à Muhammad l’accès d’intercession (al-wasîlah) et la Grâce surabondante (al-fadîlah), et élève-le à la station de louange (maqâm mahmûd) que Tu lui as promise ». Et certes Dieu ne manque pas à Sa Promesse !

Telle est la doctrine exotérique de l’Islam. Mais pour l’ésotérisme islamique, les savants sont ceux à qui Dieu enseigne directement la Science : « Craignez Dieu et Il vous instruira. »94 Et le Prophète, le plus humble des serviteurs, reste le maître (mawlâ) de cet enseignement divin. Il constitue non seulement le modèle exemplaire à suivre, mais la réalité spirituelle à laquelle les voyageurs sur le chemin de Dieu (as-sâlikûn fî sabîli-Llâh) aspirent à s’identifier dès ce monde-ci. Quand les gens du Soufisme prient sur lui, ils savent qu’il est secrètement vivant dans le monde du mystère (al-ghayb), puisqu’il a dit : « Personne ne m’adresse le salut »95 Comment l’Esprit muhammadien pourrait-il disparaître, puisque c’est par lui que Dieu soutient les mondes ? ô Dieu, puisses-tu faire de cet Esprit notre esprit, sous tous les aspects, dans ce monde-ci avant l’Autre Monde.

Ya ‘Azhîm !


  1. Ce Hadîth, souvent cité par Ibn ‘Arabî et les auteurs du Soufisme, ne se trouve pas dans les recueils canoniques.
  2. Fuçûc al Hikam. Trad. T. Burckhardt, La sagesse des Prophètes, p. 22, Albin Michel.
  3. Cor. 51 : 56.
  4. Ibn ‘Abbâs est l’un des premiers commentateurs du Qur’ân.
  5. II fut disciple de Sadr ad-Dîn al-Qûnawî, l’un des disciples de Ibn ‘Arabî.
  6. Cor. 15 : 21.
  7. ‘Abd ar-Razzâq al-Qâshânî fut disciple de Mu’ayyad ad-Dîn Jandî, lui-même disciple de Sadr ad-Dîn al-Qûnawî.
  8. Içtilâhât as-Sûfiyyah. Trad. Nabil Sawfat, A glossary of Sufi Technical. Terms, p. 3, The Octagon Press.
  9. Al-Futûhât al-Makkiyyah II 396.30. Trad. W. Chittick, In The Sufi Path of Knowledge, SUNY.
  10. Cor. 17 : 110.
  11. Bukhârî et Tirmidhî.
  12. Futûhât II 203.3.
  13. Trimidhî et Ibn Mâjah.
  14. Cor. 15 : 85.
  15. Tirmidhî. La variante « alors qu’Adam était entre l’eau et l’argile », qui ne se trouve pas dans les recueils canoniques, est souvent citée par les soufis.
  16. Bukhârî.
  17. Muslim.
  18. Cor. 68 : 4.
  19. Cor. 40 : 35.
  20. Tirmidhî.
  21. Dans le Tradition hindoue, ces deux pôles sont Purusha et Prakriti. Voir R. Guénon, L’homme et son devenir selon la Védanta. Editions Traditionnelles.
  22. Cor. 30 : 27.
  23. Cor 24 : 35.
  24. Cor. 33 : 46.
  25. Cor. 49 : 21.
  26. Le mot rûh, esprit ou souffle, est féminin en arabe et évoque la réceptivité à l’ordre divin (al-amr).
  27. Cor. 2 : 286.
  28. Cor. 97 : 3. Mille mois lunaires représentent symboliquement la durée de la vie humaine.
  29. Bukhârî et Muslim.
  30. Cor. 63 : 7.
  31. Les Dalâ’il al-Khayrât recensent 201 noms du Prophète.
  32. Le traité, souvent attribué à Ibn ‘Arabî, semble en fait avoir été écrit par al-Maqdîsî.
  33. Shajarat al-Kawn. Trad. M. Gloton, L’Arbre du Monde, p. 101. Les Deux Océans.
  34. Cor. 21 : 107.
  35. Cor. 3 : 31.
  36. Cor. 18 : 60.
  37. Cor. 18 : 110.
  38. Cor. 14 : 10.
  39. Cor. 94 : 1.
  40. Cor. 95 : 4-5.
  41. Cor. 38 : 71 et 15 : 28.
  42. Cor. 15 : 29.
  43. Cor. 38 : 75.
  44. Fuçûç. Trad. op. cit. p. 133.
  45. Fuçûç. Trad op. cit. p. 24.
  46. Cor. 7 : 14-17.
  47. Tirmidhî.
  48. Cor. 2 : 119.
  49. Cor. 2 : 97.
  50. Tirmidhî.
  51. Bukhârî.
  52. Muslim.
  53. Cor. 29 : 56.
  54. « Si l’on disposait dans cette Terre le Trône et ce qu’il englobe, le Piédestal, les Cieux, les Terres, les réalités les plus inférieures, les Jardins Paradisiaques sans exception et les Feux infernaux, tout cela s’y trouverait comme l’anneau placé dans le désert ! Cette Terre contient des réalités étonnantes et étranges dont on ne peut estimer l’importance et les intelligences en restent subjuguées. En chaque souffle Dieu crée en cette Terre des Mondes qui “célèbrent Sa Gloire nuit et jour sans se relâcher” (Cor. 21 : 20) ». Futûhât I 126. Trad. M. Gloton, in L’Arbre du Monde, p. 133, cf. aussi H. Corbin, Corps Spirituel et Terre Céleste. Buchet-Chastel.
  55. Cor. 9 : 129 et de nombreux autres versets.
  56. Cor. 40 : 7.
  57. al-mustanad al-ilâhî, le point d’appui en Dieu de toute réalité créée.
  58. Dieu connaît le mystère et l’apparence des choses. Il est ‘âlim al-ghayb wa-sh- shahâdah. Cor. 59 : 22.
  59. Cor. 19 : 17.
  60. Ibn ‘Arabî, in Mishkât al-Anwâr. Trad. M. Valsân, La Niche des Lumières, p. 100. Les Éditions de l’Œuvre.
  61. Futûhât II 603.14. Tras. W. Chittick, in Les Illuminations de la Mecque, p. 242. Sindbad.
  62. Futûhât II 214.7. Trad. op. cit. p. 244. Ibn ‘Arabî explique ailleurs qu’il y a aussi une racine divine à la pauvreté et au rabaissement.
  63. Futûhât II 214.23. Trad. op. cit. p. 246.
  64. Cor. 96 : 1-5.
  65. Bukhârî.
  66. Cor. 74 : 1-5.
  67. Ibn Handal et Abû Dâwûd.
  68. Ibn Handal.
  69. Bukhârî.
  70. Bukhârî.
  71. Bukhârî.
  72. Cor. 75 : 16-19.
  73. Cor. 73 : 1-4.
  74. Bukhârî.
  75. D’après Ibn al-Jawzî, il aurait transmis 5374 ahâdîth ! Sa mémoire était prodigieuse.
  76. Cor. 93 : 1-3.
  77. Bukhârî et Muslim.
  78. On sait que la racine RHM de Rahmah, l’Amour divin, se retrouve dans rahim, la matrice maternelle.
  79. Bukhârî.
  80. Muslim.
  81. Bukhârî et Ibn Mâjah.
  82. Cor. 33 : 56.
  83. Tirmidhî.
  84. Bukhârî.
  85. Bukhârî et Muslim. Il y a plusieurs variantes de ce hadîth.
  86. Cor. 4 : 97.
  87. Médine restera la capitale du Califat sous les quatre premiers califes, les bien-guidés (ar-Râshidûn).
  88. Rappelons que Muhammad est, pour les musulmans, le Consolateur (Parakletos) annoncé dans l’Évangile selon St Jean.
  89. Cor. 79 : 6.
  90. Cor. 79 : 7.
  91. Cor. 17 : 79.
  92. Bukhârî.
  93. Tirmidhî, Abû Dâwûd et An-Nasâ’î.
  94. Cor. 2 : 282.
  95. Abû Dâwûd.

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